Dans nos sociétés africaines ou afro descendants, l’art fonction de l’art n’est pas dissociée de la vie courante. C' est une prolongation de notre vie de tous les jours. L’art est présent partout. Dans la manière de parler, de manger, de s’habiller, d’interagir avec l’autre, de se déplacer. Lors des initiations du passage du jeune garçon à l’homme en Casamance, appelé le “BUKUT” ou Bois Sacré, on peut déceler cette reconnection avec soi chez l’humain. En tant que Joola, cette étape est primordiale dans leur vie. L’architecte, Pierre Goudiaby Atepa, le designer El Hadji Malick Badji, tous les deux, enfants du Sud du Sénégal ont été obligés de passer par cette étape qui est organisée tous les 40 ans. Dans le processus, tout est art mais aussi tout est vie. L'accueil ou le jeune initié doit danser devant toute sa famille, se faire raser la tête par ses cousins, rendre visite à sa lignée maternelle et paternelle, tout rentre dans le cadre de rendre au jeune homme son humanité.“ Nous ne sommes pas étrangers à ce que nous désirons représenter, mais parties intégrantes d’un sujet, d’un espace, d’un environnement : il s’agit de « faire communauté ”, affirme Koyo Kouoh. Ces mots confirment, en quelque sorte, comment l’art est rattaché à la vie courante au sein de notre communauté. Toutes les expressions artistiques en Afrique sont une continuité de la vie courante et elle mène vers “the reawaken of self”. Par ailleurs, ces expressions, rituels, pratiques renforcent la dynamique de Souveraineté, d'humanité et de prise de position. Dans son livre intitulé “ Oum Khaltoum, l’histoire d’une passion”, Mohamed ARAD décrit la diva en ces termes : «marqué les arts et la littérature par une tradition éthique de l’écoute et du respect du public, changeant ainsi la perception des chanteurs à travers l’histoire de la culture et des beaux-arts». Ainsi, on pourrait s’aventurer à dire que l’art change la perception en renforçant notre humanité. Devant un tableau, le visiteur est dans une hypnose de contemplation, de réflexion et d’introspection.
Devant mes yeux, une grande silhouette. Haut de ces 5 m de hauteur, il fait deux fois la taille d’un géant sahélien. Il peut etre un homme, une femme ou une hybride cachée. Oui, son visage est caché ! Son camouflage le rend encore plus mystérieux tel un esprit maléfique venu s'abattre sur le “Tiétémalo” (l’homme qui n’à pas honte ). Ce galbe coloré majoritairement de carreaux bleus, blancs et marrons, en peinture, est effrayant plus que tu t’approches de lui. Dès que tu t'éloignes, on dirait qu’il devient un gentil comme un Koreduga. En effet, cette figure emblématique de la culture malienne joue le rôle de bien être dans la société en arborant l’art de la dérision. Afin d’effacer ses peurs et celles de son assistance, ils les invitent à ne pas se prendre au sérieux. C'est-à -dire à danser, à rire, à extrapoler de ces propres bêtises. Le ressenti du passeur n’est pas vain. Surtout s’il s’agit de dégoût, de compassion, de passion, de peur ou d’abandon.
Existence
Pour l’artiste Tunisien Wadi “l’art, c’est la vie”. Passé par des études de mode à Paris, Wadi s’est intéressé à tout. La photographie, la gravure, la vidéo, l’installation…entre autres. “Créer, c’est vivre”, disserte-t-il. Son travail est interactif. Il communique avec le sujet, l’espace ; et surtout la communauté. Enfant, Wadi ne s’entendait pas trop bien avec sa mère, tandis qu’il décrit son père comme étant “l’amour de sa vie”. Un père qui était toujours présent.
“J’avais un rapport beaucoup plus attaché avec mon père. Et la, avec la disparition de papa, c’est une connection totale avec maman. Mon père suivait absolument tout ce que je faisais. Il était mon plus grand fan”. Son histoire avec son papa est poétique, oh que bien philosophique comme l’histoire de l’aviateur et le petit prince d'Antoine de Saint-Exupéry.
Dans le chapitre XXI, il est écrit ceci : “Les hommes n’ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n’existe point de marchands d’amis, les hommes n’ont plus d’amis.” Le fil revient plusieurs fois dans ses différentes créations. Notamment dans cette collaboration avec sa compatriote Mouna Jemal. Si vous prenez un bon vin rouge, il se peut que ayez des visions de bouts de tissu coupés et collés pour former ce dessin du TieteMalo. “J’ai commencé à explorer cette technique avec une amie à moi qui s’appelle Mouna Jemal. C’est un travail en duo que nous avons fait ensemble. Elle travaille beaucoup sur les pixels. Et la, c'était une manière de partager.”
Ses collaborations avec Mouna Jemal ne datent pas d’aujourd’hui. Sur Dream City, un projet datant de 2012/2013, les artistes entrent en campagne s’imposant sur les murs de la ville et sur la toile. Une campagne électorale fictive et artistique qui questionne l’identité, l’appartenance et la liberté de choix.”
Les œuvres de Wadi explorent l'interactivité de notre comportement personnel dans un processus d'éveil, d'épanouissement, de joie et de conscience collective. Le travail de ce “petit prince” est difficile à cerner car explorant le pariétal et le rupestre.
Origine et représentation
En discutant avec l’artiste Wadi Mhiri, il nous a parlé de la représentation pixelisée de cette œuvre comme pour explorer la quête de Bou Saadiya. Dans la culture populaire en Tunisie, il existe un personnage similaire au Koreduga au Mali. En effet, comme le Koreduga ( l’homme qui n’à pas honte ) dans la culture malienne, son visage est caché par un voile. Tous ces deux personnages nous apprennent l’art de relativiser. En effet, parti de l’empire du Soudan, le père de Saadiaya, Bou est parti à la recherche de sa fille bien aimée. Son tendre enfant a été enlevé par des esclavagistes arabes. Bouleversé mais patient, Bou Saadiya parcourt le Maghreb, chantonnements et pas de danses, tout en espérant que sa fille entende ses chants pour le retrouver. Une histoire répandue dans le culte Stambali, qui aujourd’hui commence à s’estomper. Néanmoins, le Bou Saadiya est toujours pratiqué au Maroc, en Algérie et en Tunisie. Ces deux personnages nous invitent ainsi, à ne jamais se débarrasser de notre sens de la dérision, malgré nos peurs. Notre cœur d’enfant doit être protégé dans nos épreuves les plus difficiles.
“Le boussadia porte un masque de cuir, un haut bonnet conique et une tenue en haillons, sorte de robe de couleur hétéroclite coupée en lanière censée représenter une peau d'animal[1], par-dessous un pantalon de toile très légère. Ces habits amples lui permettent de pratiquer une danse marquée d'attitudes burlesques, les pieds croisés l'un devant l'autre, et de tourbillons sur lui-même[2] en l'absence de musique mais accompagné par ses castagnettes en fer ou en cuivre et parfois un tambourineur. Le boussadia est aussi musicien : d'une part, percussionniste, dès lors qu'il joue par lui-même des castagnettes en fer, du tambour[3], ou des grelots[4], trois instruments de percussion. D'autre part, si le boussadia est un danseur, il est aussi un chanteur[6].” partagé par l’artiste